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10 000 km plus a l'Est
30 septembre 2010

Les effets pervers de la productivité

J'écoutais aujourd'hui l'excellente émission de reportages de France Inter : Interceptions. Cette fois-ci, les journalistes sont allés enquêter sur les ratages de la mise en route de Pôle Emploi. On y apprend les radiations abusives, la fusion mal préparée et menée au pas de charge, les "usagers" transformés du jour au lendemain en "clients", le manque de moyens humains. Le malaise des agents grandi. Les penseurs de la réforme, tout à leur recherche d'efficacité, de résultats , ont oublié une chose : ces agents de Pôle Emploi, qu'ils méprisent sûrement un peu, sont confrontés tous les jours à la glaise humain. Désorientés devant le nouveau mot d'ordre officiel : faire du résultat, certains agents craquent quand on leur enlève leur portefeuille d'usagers, avec qui ils avaient établi la confiance, dont ils connaissaient le parcours, les failles... Certains, devant l'ubuesque de la situation,  s'en sortent avec des réponses en biais "ah ça , ce n'est pas moi qui m'en occupe", "Faites-nous une lettre et attendez 10 jours avant de nous rappeler", "Je n'ai pas le temps de voir cela aujourd'hui"... Ceux qui s'impliquent, qui pensaient que leur travail avait un sens, trinquent. En filigrane du reportage, on sent bien que le mal qui ronge, c'est la déshumanisation. Les humains remplacés par des boîtes vocales (Pour ceci, tapez 1, pour cela , tapez 2), les humains à qui on ne laisse plus le temps d'être humain, les usagers en détresse devant le rempart de l'administration imperméables à leur situation personnelle.

Stress_au_travail

Et c'est là que je me suis dit que ce Japon, qu'on nous dit si déshumanisé, ces Japonais même qui se sont fait traiter de fourmis par une de nos Premier Ministre, oui, ces Japonais là, ont l'intelligence collective de laisser sa place à la relation humaine. Quand j'ai été changer mon téléphone portable, je ne suis pas arrivée avec tous les documents nécessaires. Je n'avais pas fait le transfert de ligne. J'avais même oublié mon formulaire de réservation ... La jeune femme qui m'a reçue ne m'a pas laissé entrevoir l'ombre de la moindre contrariété. Elle a décroché son téléphone et fait les formalités auprès de mon ancien opérateur téléphonique à ma place. Ses chefs avaient pensé à ce cas de figure et lui avaient fourni les outils pour y faire face. Il y avait beaucoup de monde qui attendait, mais elle ne subissait pas le stress de la file d'attente.  Ses chefs avaient calibré le nombre d'agents pour qu'ils soient assez nombreux à cette heure de la soirée  pour absorber le flux.  Ils avaient aussi pensé à mettre en place un agent "volant" dont le rôle est de recevoir chaque nouvel entrant dans l'agence et de vérifier avant de lui donner un ticket d'appel, que sa demande correspond à qq chose qui doit être traité au guicher ; dans le cas contraire, il le renseigne lui-même. Voilà un petit exemple parmi d'autres de ce qu'une bonne organisation du travail peut avoir comme résultat : des clients satisfaits par un service au top, des agents à qui l'on donne les moyens de leur mission et qui ne dépriment pas. Bien sûr, la logique financière, le Bottom Line, en prend un coup.  A court terme peut-être, mais à long terme ? Quel est le coût pour la société d'avoir de plus en plus de gens au chômage, une insécurité et une incivilité qui grandissent parce qu'ils n'y a plus assez d'adultes dans les écoles, d'infirmières dans les hôpitaux, de police de proximité dans les quartiers ? Regardons un peu ce qui se passe ailleurs. Il ya des bonnes idées à prendre, ou du bon sens à retrouver.

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