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10 000 km plus a l'Est
21 février 2010

Charité ou solidarité

Vivre à l'étranger, c'est chausser de nouvelles lunettes. Voir les choses sous un autre angle. Et se faire bousculer dans ses idées préconcues, bien enracinées, que l'on croyait mûrement réfléchies. Or, on se rend compte à quel point on peut être conditionné par la pensée dominante de son pays, à l'insu de son plein gré (!).

Prenons l'exemple de la charité. Dans notre pays pétri de principes républicains et dans lequel le mot Egalité est inscrit aux frontons des Mairies, on se méfie de comme de la peste de la charité. Elle rappelle de mauvais souvenirs, ceux d'un temps où dans un pays traversé par les inégalités sociales, la charité était le fait des nantis, des nobles, au profit des nécessiteux, le peuple. Depuis que l'égalité a été proclamée entre tous les citoyens, faire la charité est une action qui traine une odeur de souffre anti-républicaine.On lui préfère le beau concept de Solidarité.

Dans d'autres pays, aux Etats Unis notamment, le Community Service est quelque chose de fortement valorisé. On inculque aux enfants dès les petites classes que d'autres ont moins de chances qu'eux et qu'il est bien de les aider. Dans une société sans filet de sécurité sociale, ces actions permettent à de nombreuses personnes de garder la tête hors de l'eau.

Alors, pour ou contre ?

On connait les arguments contre :

- la charité est prodiguée quand la justice sociale est absente. Sans justice, la charité n'est qu'un emplâtre sur une jambe de bois,ou , pour les nantis, une façon de soulager sa conscience. La justice sociale s'obtient par le prélèvement de l'impôt et sa redistribution, le b.a. ba de la solidarité.

- la charité est sélective : elle permet de choisir ses pauvres, elle permet d'exclure les pauvres "indésirables" selon les critères de valeur des uns et des autres : les noirs, les gays, les femmes seules en situation d'avorter, les immigrés peuvent ainsi être exclus de l'aide...

La solidarité, au contraire, est universelle. Elle nécessite au préalable, pour fonctionner, un prélèvement obligatoire sur les richesses de chacun et sa redistribution décidée par le politique.

Avantage : elle est universelle, elle s'opère sans critère de race, de sexe, de préférence sexuelle...

Oui mais, elle déresponsabilise. Elle fait perdre le pouvoir de décider de donner, de prélever volontairement sur son revenu pour aider son prochain. Un réflexe pas du tout évident quand on y pense. Alors oui, c'est vrai, les Français sont généreux, ponctuellement, pour donner lors de catastrophes humanitaires lointaines, comme lors du tsunami ou du tremblement de terre en Thailande. Mais donner pour son prochain ? Dans le même pays que soi ? Voilà qui est beaucoup moins naturel.

Alors, justice sociale menant à la déresponsabilisation individuelle ? Ou inégalités sociales assumées, avec comme filet de sécurité la charité individuelle? Je serais tentée de répondre que la justice sociale est non négociale, et que c'est bien du ressort de l'Etat d'organiser la solidarité et la justice sociale (passant notamment par la santé) pour ses citoyens. Mais qu'un zest de charité pour son prochain, pour combler les lacunes, inévitables, de la machine étatique, et remettre du lien, de l'humain dans le beau concept d'entraide n'est pas non plus à négliger.

Un équilibre difficile à atteindre, parce que par nature basé sur des principes antagonistes. Essayons, quand même !

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